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Benchaabane Mohand Larbi, directeur et propriétaire du complexe touristique M’Hiddine-Targa-Aïn Témouchent
«Cap sur le tourisme médical».
Habitué des grands événements du secteur du tourisme, (Sitev- Siaha d’Oran), Mohand Larbi Benchaabane nous a accordé un entretien où il nous fait part de l’inauguration imminente du centre de rééducation et de thalassothérapie. Il évoque avec optimisme, l’avenir du secteur du tourisme, même si, dit-il «beaucoup de choses sont à revoir et à améliorer». Il évoque notamment, les lenteurs bureaucratiques, le système bancaire inapproprié et les décrets d’application de certaines lois qui tardent à arriver. Ci-après l’entretien.
1- Habitué des salons et autres événements du secteur, y a-t-il du nouveau pour cette édition de SIAHA 2024?
Après la bataille du tourisme local qu’on a gagnée, on planche sur un volet peu développé chez nous, c’est le tourisme médical. Ce que vous voyez sur ces tableaux, ce sont les équipements d’un centre de rééducation physique et de réadaptation qui ouvrira bientôt, dans deux à trois mois. Avec la persévérance, le courage et l’accompagnement de l’administration et des banques, on est arrivés à concrétiser, peu à peu, le projet. Même si, parfois, on les met devant un état de fait accompli mais la sagesse et la raison l’ont emporté pour la bonne cause.
Pour revenir à la nouveauté, on est sur les captages des eaux marines (à deux kms au large, le plus long captage du monde, pour des raisons de sécurité sanitaire). La première partie souterraine de l’opération est finalisée, on attend que la mer soit plus calme et le retour de l’entreprise réalisatrice (tunisienne) pour achever la partie.
2- Quelle clientèle ciblez-vous par la réalisation de ce projet d’envergure ?
Ce projet est à double utilité, publique et étatique: Publique car, beaucoup de nos compatriotes partent en Tunisie, Turquie ou ailleurs pour des soins, avec le concours de la CNAS (caisse nationale d’assurance sociale). On envisage, dès la première année d’exploitation, de prendre en charge 25% de cette catégorie de gens. Comme je l’ai déclaré au premier ministre qui nous a rendu visite au précédent SITEV: Si l’administration, les banques nous accompagnent dans un cadre réglementaire, en cinq ans on prendra en charge toute cette masse importante qui part à l’étranger pour se soigner et faire de la rééducation à l’étranger, au niveau de Aïn Témouchent. Notre stratégie est d’arriver à faire dire à ces gens: «je suis allé à Aïn Témouchent, au lieu de la Turquie, la Tunisie ou ailleurs».
Dieu merci, après un séjour chez nous, l’été dernier, nos concitoyens ont déclaré à la télévision qu’ils étaient satisfaits et qu’ils n’iront plus à l’étranger, tout en promettant d’y revenir. Certains ont même souhaité de voir des projets similaires au nôtre dans chacune des 14 wilayas côtières.
3- Bientôt le mois de Ramadan, est ce que vous envisagez une formule spéciale pour attirer les familles?
Les gens sont casaniers durant le mois de Ramadan. Ils préfèrent rester chez eux en famille. On a proposé des appartements équipés de toutes les commodités à un tarif très symbolique de 4000 DA la nuitée, mais les gens ne viennent pas, contrairement à la période où le mois sacré tombait en juillet et aout. Au courant du Ramadan, on renforcera les travaux pour être fin prêt (fin avril, début mai), pour procéder à l’ouverture du centre de rééducation.
4- Comment appréhendez-vous la prochaine saison touristique?
Vous voyez le genre d’infrastructure qu’on a: 4 grandes piscines à l’eau de mer, intérieures et extérieures, de très grands appartements équipés qui peuvent recevoir 10 à 15 personnes. Selon l’expérience acquise avec l’ancien projet, lorsque les gens viennent chez nous, ils ne demandent qu’à combien ils peuvent être dans un appartement et à quel prix.
C’est par rapport à ça qu’on a réalisé de spacieux appartements pour permettre aux familles de s’installer aisément. La famille gagne en coût et nous, en gagne par le nombre.
5- Qu’en est-il de la formation du personnel qui opère dans les différents services de vos établissements?
C’est le point fort de notre établissement. J’ai commencé à former mes enfants et petits enfants. Ils ont tous un niveau universitaire et sont diplômés dans les différentes spécialités pour pouvoir gérer l’établissement. Pour le personnel exécutant, on travaille en collaboration avec les écoles hôtelières, notamment celle de Tizi-ouzou. Notre stratégie se concentre sur le comment faire revenir le client et le fidéliser. Lorsqu’une famille vient chez nous, il faut qu’elle se sente à l’aise à tout point de vue. Notre slogan est d’ailleurs «une famille au service des familles».
6- Un mot sur ce salon, SIAHA 2024
C’est un plaisir de participer à l’événement qui prend de l’ampleur d’année en année. Depuis son ouverture, il y a des nouveautés chaque année. Il y a une concurrence loyale qui est en train de s’installer dans le secteur et c’est bénéfique; chacun veut donner une prestation meilleure que son voisin. Maintenant, place à la concurrence côté prix. Nous concernant, on peut baisser les prix mais, il y a un problème: les modalités de payement des crédits constituent un sérieux problème. On ne critique pas les banques car, si ce n’est pas les organismes bancaires, moi-même je ne serai pas là à vous parler. Mais la question des crédits importants (des centaines de milliards) sur le court, voir le moyen terme de dix ans, est une chose impossible. C’est pour ça que 70% des grands projets financés par les banques, ont tous des difficultés de remboursement. On a tiré la sonnette d’alarme plusieurs fois pour aller au remboursement sur le long terme: La banque est gagnante et ça soulage l’investisseur qui ne se retrouvera pas en difficultés de remboursement. On lance un appel aux hautes autorités pour prendre nos doléances en charge, pour régler le problème, notamment concernant le balnéaire. On se débat chaque année avec les squatteurs des espaces attenants aux établissements touristiques. Pourtant la loi est claire (Loi 02/03 qui stipule que les espaces attenants aux établissements touristiques balnéaires suivent, de fait, ces derniers en concession)! Il manque, parfois, des décrets d’application pour que les choses aillent normalement.
On ne doit plus faire du populisme pour développer le tourisme. Je suis partisan du développement du tourisme domestique. Avec une structure haut de gamme comme ça, je pratique des tarifs d’une structure bas de gamme. J’ai envie de faire répercuter tous les efforts et avantages au profit du citoyen.
7- …Revenons à la prochaine saison, comment la voyez-vous ?
Ça s’améliore et il y a de l’espoir…mais il y a beaucoup de choses à revoir.
Il n’y a pas un pays doté d’un arsenal de lois pour développer le secteur du tourisme, comme notre pays, mais les textes d’application n’arrivent pas. Parfois, vous prenez avec vous-même le journal officiel, une fois face à l’administration, on vous dit que le texte d’application n’est pas encore arrivé! Espérons que notre voix soit entendue en haut lieu, car le secteur du tourisme, et j’en suis convaincu, peut se substituer aux hydrocarbures dans un avenir très proche, pourvu qu’on le prenne en considération.
A. Achour