- Détails
- Catégorie : Nationale
- Affichages : 134
Hamou Ouyehia, est ex-DG des EGT de Tamanrasset et de Tipaza et ex-directeur de nombreux hôtels des quatre coins du pays. Au compteur, il a 45 années d’exercice à son compte, depuis 1978).
«Naviguer à vue n’arrange pas les affaires du secteur»
Notre interlocuteur qui a assisté à la rencontre organisée par la Fédération nationale de l’hôtellerie et du tourisme (FNHT), dans le sillage du salon Siaha d’Oran (édition 2024)- Voir l'article intitulé: La FNHT tente de regrouper les hôteliers- en est sorti un peu froissé, si non déçu et désolé. Destinations Algérie a recueilli, à chaud, ses impressions et ressentiments.
D’emblée, notre interlocuteur s’est interrogé sur la rencontre des hôteliers animée par la FNHT, lors du salon SIAHA d’Oran: «Le secteur public dispose de 74 hôtels toutes catégories confondues (balnéaire, saharien, de montagne, urbain, thermal)…je n’ai vu personne ! Aucun directeur, DG d’EGT et représentant, alors que j’en connais et c’est des professionnels jusqu’à la moelle épinière». Une question qui lui triture les méninges: Pourquoi la FNHT ne fait rien pour les impliquer ?
L’orateur souligne qu’il a assisté à la création de la Fédération nationale des hôteliers, comme par hasard, au même lieu où la rencontre a été tenue, du temps de l’ex-ministre Smaïl Mimoun.
Pour lui, rien n’a été apporté de nouveau lors de cette rencontre. «Ils ont fait le constat que tout le monde a fait! Il faut trouver des solutions et celles-ci sont connues de toutes et de tous», tranche-t-il.
A ses yeux, en sa qualité de professionnel, il ne faut aucunement mettre l’aspect pécuniaire au devant, dans l’industrie touristique. «Leur logique est claire. Ils pensent «rentabilité et argent», avant de s’interroger à nouveau «où est donc la prestation de service dans tout cela, le rapport qualité /prix et la promotion touristique ? Est-ce qu’on a le savoir-faire pour attirer le touriste et l’orienter en Algérie? Est-ce qu’on a un contact avec les tour-opérateurs?...
L’un des intervenants a affirmé qu’on ne les connait pas! «Je suis désolé, on les connait: Ce sont les pays émetteurs de touristes vers notre pays, lors des années 70-80, période où des représentations touristiques existaient dans les cinq capitales importantes (Paris, Berlin, Rome, Londres, Washington) et la destination Algérie était des plus prisées.
En observateur avisé, il fait remarquer: Certains faits constatés sont révélateurs et ne laissent pas indifférent. Un agent de voyage qui loue son diplôme pour exercer, c’est inadmissible ! Le nombre d’agences de voyages est supérieur au nombre de touristes étrangers qui visitent le pays! «C’est illogique et anormal. On distribue des agréments aux gens qui n’ont rien à voir avec le secteur qui, au contraire, salissent l’image de marque de l’Algérie touristique», fulmine-t-il, avant d’ajouter: «Sans doute, il y a des professionnels qui n’ont pas les moyens pour fonder des entreprises; il faut les aider en leurs octroyant des crédits bancaires».
Le triptyque, le socle de l’industrie touristique
Primo, la formation: «Même au niveau des instituts étatiques, elle est à revoir», estime-t-il, car, selon lui, «l’hôtellerie a évolué tout comme le monde, la mise à jour est continuelle».
L’orateur jette un regard rétrospectif et évoque les conditions dans lesquelles sa génération a fait sa formation. «Avant, lorsqu’on a fait notre formation, tout était fait au stylo et à la main; ce n’est plus le cas de nos jours! Tout est informatisé», dit-t-il, avant d’enchainer: «Et dire que le président de la république n’a cessé de marteler et de répéter, à chaque occasion que les entreprises doivent informatiser leur système pour basculer vers la numérisation».
Secundo : Le recrutement. «Les hôtels privés doivent recruter des professionnels, ceux qui sont passés par des instituts et écoles professionnels», affirme-t-il, précisant qu’il ne parle pas de la quasi-totalité des établissements privés dont les procédés le désolent: «Est-ce normal de délivrer un diplôme de chef cuisinier en trois mois, s’interroge-t-il, avant de noter «C’est vraiment scandaleux !».
Second regard au rétroviseur: « On a fait l’institut de Tizi-Ouzou durant trois ans et encore, le candidat n’est que cuisinier» , indique-t-il, précisant que le programme étudié à l’époque, était celui de l’école de Lausanne (Suisse). Une convention entre les deux établissements a été conclue pour que des enseignants suisses viennent donner des cours, durant un mois, de manière régulière. «C’est dire qu’il y avait une formation de base», renchérit-t-il.
Un intervenant a affirmé que le directeur d’un établissement hôtelier devait se tenir de manière impeccable, bien rasé, costumé et sans bague (sauf l’alliance)… « C’est strictement interdit, même la moustache. En tant que professionnel, je n’admets pas ce que je vois de nos jours, en grande partie», note-t-il avec dépit.
Le directeur d’hôtel est un métier. Il faut qu’il soit là dès le début de l’investissement, parce qu’il a besoin de tout savoir sur l’établissement: où est passée l’électricité, où sont les chaudières etc… «Maintenant, le directeur figurant sur l’agrément délivré par la direction du tourisme et celui qui fait l’ouverture de l’établissement ne sont pas les mêmes,… On ramène quelqu’un d’autre, même s’il n’est pas qualifié, généralement de la famille», affirme-t-il avant de dénoncer : «Cette pratique touche de plain fouet la qualité des prestations fournies. Autrement dit, on ne retrouve pas toujours les gens qu’il faut là où il faut».
Tertio, le travail en synergie de tous les acteurs concernés. La coordination entre les gens du marketing et les professionnels du secteur est de mise, alors que de nos jours, elle fait défaut et de manière criarde. Naviguer à vue n’arrange pas les affaires du secteur.
Une anecdote : Sur le point de rentrer à Ghardaîa où j’étais en poste, quelqu’un du secteur m’avait dit ceci: «voulez-vous déposer ce courrier à Djanet, sur votre chemin vers Ghardaïa»! Cela se passe de tout commentaire.
A. Achour